Le Bois du Croé : à la recherche du gardien d’une forêt de montagne

Imaginez un matin où la lumière s’étire doucement sur les cimes des arbres, comme un voile nacré enveloppant la forêt. Les premiers rayons du soleil percent délicatement le feuillage, dessinant des motifs dansants sur le chemin forestier qui s’étend devant vous. Vous voilà au seuil d’un sentier ludique et pédagogique de la station de Crest-Voland Cohennoz, spécialement conçu pour les familles : le Bois du Croé.

Cette promenade, qui serpente à travers la montagne savoyarde, vous entraîne dans un refuge de tranquillité, loin du tumulte du monde. Chaque pas vous plonge dans les secrets que la forêt murmure à l’oreille de ceux qui veulent bien écouter. Mais ce n’est pas un voyage à faire seul. Pour en saisir pleinement la portée, il faut des compagnons d’aventure dotés d’un cœur pur et d’une âme curieuse. Agathe, quatre ans et demi, Paul, six ans, et Claire, huit ans, furent tour à tour nos éclaireurs. Les dynamiques d’échange qui en résultèrent démontrent que le Bois du Croé ne se contente pas de dévoiler ses mystères aux plus jeunes, mais qu’il sait également séduire ceux qui les accompagnent.

Sans même vous en apercevoir, le sentier vous absorbe tout entier. Le calme apaise votre esprit, chaque racine sous vos pieds vous ancre un peu plus à la terre. À vos côtés, les enfants s’immergent dans une quête où chaque indice rencontré au gré de leur avancée efface peu à peu toute notion de temps. Ici, aucune urgence, aucune course contre la montre. La seule performance requise est de laisser votre esprit vagabonder dans l’imaginaire.

S’ouvre alors une double exploration : celle des surprises en pleine nature qui attendent les enfants et leurs proches, et celle d’une voie qui, tout en douceur, dessine les contours d’un avenir durable pour la montagne. Et allez savoir ? Peut-être qu’en se prêtant au jeu, on y trouve bien plus que le secret du mystérieux gardien de la forêt de Cohennoz.

À l’aventure au cœur de la forêt

Mais quelle magie opère lorsque les enfants s’aventurent dans ce sanctuaire forestier ? Dès les premiers instants, Paul se retrouve plongé au cœur d’un véritable terrain de jeu, jalonné d’installations ludiques qui l’invitent à explorer la biodiversité locale. Pour lui, chaque rencontre avec un animal devient une nouvelle pièce d’un puzzle à reconstituer. Ici, un chamois surgit, là, un renard se faufile, et plus loin, un blaireau apparaît. Ces créatures sont autant d’indices menant à l’énigmatique protecteur de la forêt. Très vite, la balade se transforme en une quête où sa curiosité est inlassablement récompensée.

Agathe, quant à elle, se laisse emporter par cette succession d’indices. Elle court d’un arbre à l’autre, ramassant des cailloux qu’elle serre dans ses petites mains, impatiente de les montrer à ses grands-parents. Son regard suit les fourmis au sol, tandis qu’elle cueille une myrtille avec précision. Devant un casse-tête en bois géant, ses doigts s’activent pour en reconstituer l’image. La tâche n’est pas toujours évidente, et parfois l’aide des autres est nécessaire. Mais Agathe ne s’attarde pas longtemps : la forêt cache encore tant de surprises, et elle est déjà repartie à la recherche de la prochaine découverte.

À mi-parcours, le sentier croise celui des Arpelières, menant à l’une des plus grandes tourbières d’Europe, une réserve naturelle d’une valeur inestimable. Claire, partagée entre émerveillement et curiosité, se familiarise avec les ressources insoupçonnées de ce lieu unique. Elle tend l’oreille et écoute la voix du Croé, ce petit montagnard invisible mais omniprésent, qui lui confie une mission secrète. Les jeux interactifs captivent son attention, surtout ceux qui lui permettent d’explorer les textures de pelages et de plumes. À mesure qu’elle explore ces sensations, son lien avec les animaux de la montagne se resserre, renforçant sa connexion à cette nature sauvage.

Paul, lui, est irrésistiblement attiré par la passerelle himalayenne, suspendue à quinze mètres au-dessus du ruisseau de la Grande Combe. Avec excitation, il s’élance, la traversant et la retraversant, chaque passage ajoutant une dose d’adrénaline à son aventure. Il ne sait pas encore que d’autres expériences l’attendent, cachées dans les profondeurs des immenses épicéas, dont les cimes laissent entrevoir la chaîne des Aravis.

Le voyage se termine à la Bergerie la Palette, après un parcours plein de révélations. Les enfants pénètrent enfin dans l’antre du mystérieux protecteur de la forêt, leurs yeux écarquillés d’émerveillement. Ce gardien bienveillant les accueille avec un sourire et les invite à découvrir un dernier trésor caché, un coffre renfermant un secret bien gardé. Pour Paul, Agathe, et Claire, l’histoire ne s’arrête pas là, et c’est tant mieux. Car c’est l’inattendu, le mystère, qui a donné un sens profond à leur exploration, transformant ces trois kilomètres en une joyeuse épopée.

Aux origines du Bois du Croé

Si le Bois du Croé a su se frayer une place dans le cœur de ceux qui s’y promènent, c’est qu’il incarne l’âme de Cohennoz. Ici, la forêt règne en maître, enveloppant les trois quarts du territoire comme un vaste refuge préservé du temps. Chaque arbre, chaque feuille veille en silence sur la vie qu’elle abrite, et à mesure que l’on avance, cette réalité devient de plus en plus palpable. Les élus ont saisi l’importance de cet écrin naturel, un capital à protéger, mais aussi à partager. Car la forêt, avec sa biodiversité, est plus que jamais un héritage à transmettre.

Le sentier du Bois du Croé, pensé avec soin, s’entrelace avec la route forestière de la Palettaz, un lieu prisé des randonneurs et vététistes. En hiver, cette route devient l’une des pistes de ski les plus boisées du domaine de l’Espace Diamant. Reliant les Saisies à Crest-Voland Cohennoz, elle traverse un paysage où faune et flore cohabitent en paix. Ce territoire abrite une part précieuse de la tourbière des Saisies-Beaufortain-Val d’Arly, dont la richesse en eau semble encore nourrir la vitalité de tout un versant. C’est ce patrimoine naturel que la commune souhaite léguer aux générations futures, en ouvrant ce sentier à la découverte des plus jeunes, pour une rencontre éclairée avec cet écosystème fragile mais essentiel.

Ce jeu grandeur nature n’est qu’un chapitre d’une histoire plus vaste, un programme ambitieux initié par la commune de Cohennoz il y a déjà plusieurs années. Le point culminant de ce projet est la réhabilitation d’une vieille bergerie, blottie entre le Val d’Arly et le Beaufortain. Rénovée dans le respect des traditions savoyardes, elle abrite désormais non seulement la petite maison du gardien de la forêt mais aussi un restaurant d’altitude. Sous la direction de Floriane et Yoanne, la Bergerie la Palette est devenue un lieu d’ancrage pour randonneurs en été et skieurs en hiver, offrant une cuisine sincère, fidèle aux saveurs du terroir.

Soutenu par le Conseil Départemental de la Savoie et le fonds « Avenir Montagne Investissement », cette initiative illustre l’engagement de Cohennoz pour un développement touristique durable. Le parcours, réalisé en collaboration avec l’ONF et la Réserve Naturelle, s’est imposé comme le prolongement de la rénovation de la vieille bergerie centenaire. Depuis l’été 2023, la Bergerie la Palette et le Bois du Croé forment un duo complémentaire, renforçant l’attractivité du territoire. C’est un appel à redécouvrir ce massif alpin autrement, en ouvrant la porte à un nouveau récit, celui d’une montagne vivante et inclusive.

Le Bois du Croé fait de la commune de Cohennoz un passeur de nature, une nature qui sait donner sans compter et qui possède ce pouvoir subtil de transformer ceux qui s’y aventurent. Cette promenade réveille notre âme d’enfant, invitant à laisser les plus jeunes mener la danse, à explorer à leur rythme, à découvrir les trésors cachés de la forêt et à savourer chaque instant.

La clé de l’expérience réside dans ces moments de complicité, où pensées et émotions se libèrent, tissant des liens profonds. Agathe, Paul et Claire, en arpentant ce sentier, ont goûté à la joie de l’effort partagé, à la chaleur de l’entraide face aux défis, et à la douce satisfaction d’une quête achevée.

Ce sentier, à la fois ludique et pédagogique, est un pied de nez à l’ennui, qui pourrait guetter les enfants lors d’une randonnée trop centrée sur la performance. Il éveille au plaisir simple de la marche en montagne, à la richesse de la forêt, tout en sensibilisant à la préservation de l’environnement, symbolisée par la rencontre avec la tourbière des Saisies-Beaufortain-Val d’Arly.

Alors, n’hésitez pas, mettez vos chaussures de randonnée, prenez la main de vos enfants et laissez-vous emporter par l’aventure du Bois du Croé. En suivant ce sentier en famille, vous ne faites pas que marcher en forêt : vous empruntez un chemin vers l’avenir, celui d’une montagne qui ravive en nous un trésor précieux, celui des liens familiaux et de l’amour pour la nature.